Pour aler plus loin sur les GEM Intervention du CNIGEM lors des assises de la santé mentale et de la psychiatrie le 28 septembre 2021
Intervention de Stefan Jaffrin pour Radio HumaPsy
27/28 septembre 2021
Claude Finkelstein FNAPSY
Citoyenneté de la personne en situation de handicap psychique
Je suis très honorée de participer à ces assises voulues par Monsieur le Président de la République, en tant que représentante des patients usagers de la psychiatrie.
Pour nous ces assises représentent une occasion unique de pouvoir connaitre les attentes et les besoins tant de la société civile (dont font partie les patients), des usagers directs et des professionnels de la santé, du médico-social, et du social.
Il est indispensable de bien distinguer d’une part la santé mentale qui est du domaine de la société, de la santé publique, et donc de la prévention, et d’autre part la psychiatrie qui est du domaine médical, du soin concernant les maladies psychiques et parfois de la possibilité de privation de liberté.
Pour reprendre le premier item, nous sommes très attentifs au regard que pose la société sur la santé mentale, regard au mieux indifférent, mais souvent stigmatisant.
Nos attentes sur ce premier item : un travail de fond sur la déstigmatisation (maisons médicales pluridisciplinaires – information…) .et sur la prévention primaire notamment autour de la perinatalité et de la petite enfance). J’aimerais ici souligner l’avancée majeure que constituerait par exemple l’implantation de maison médicale pluridisciplinaire, à proximité des lieux de soins psychiatriques qui permettrait le lien, le suivi, entre les soins somatiques lors des hospitalisations et dans la vie dans la cité. Ce qui permettrait également un travail de déstigmatisation par la banalisation du soin psychiatrique.
Avant d’aborder la psychiatrie, je voudrais rappeler la création à l’initiative des usagers, des Groupes d’Entraide Mutuelle, dispositif reconnu par tous comme innovant et bénéfique pour les citoyens en situation de handicap psychique. Lorsque nous avons appris la mise en place de ces assises, nous avons réalisé parmi nos associations membres (62) un sondage (fait par et pour les patients) auquel plus de 500 patients ont répondu portant sur leur situation pendant l’épidémie de COVID.
Les questions portaient sur le recours aux dispositifs de soutien (numéros d’écoute services d’urgence etc) le ressenti au cours des périodes de confinement, et le rôle des GEM.
La majorité des réponses font ressortir que les GEM ont permis à leurs adhérents de traverser cette période difficile beaucoup mieux que si ils avaient été isolés. Elle souligne le peu d’impact qu’a eu le confinement sur les adhérents des GEM grâce au soutien, à l’accompagnement et à l’entraide mutuelle. (plus de 95 % des réponses).
Leur recours au dispositif de soutien institutionnel est resté limité, et lors de leur utilisation non adapté.
Cela rejoint le constat que nous avions fait précédemment notamment lors des périodes de canicule.
Lors de l’épidémie de COVID la réponse des services psychiatriques, l’action des GEM, ont permis, malgré les co morbidités (obésité) de limiter l’impact attendu sur notre population.
En ce qui concerne la psychiatrie, sujet qui nous concerne directement, la liste des dysfonctionnements, ressentis par les patients dans leur parcours de soin et de vie, devient longue :
– besoin d’une lisibilité commune et identifiée sur les dispositifs de soins existants
– que chaque intervenant soit identifiable par son rôle déterminé dans le processus : soins médicaux, et soins de suite et de réhabilitation.
– qu’un lien de coordination réelle existe entre ces différents services, selon les besoins de chaque patient (à leur vraie demande) qui peut être accompagnée par une évaluation extérieure mais qui doit tenir compte de leurs besoins exprimés et de leur liberté.
– que concrètement soit établie une liste des structures de soins évaluées :
CHS – services psychiatriques – CMP – UMD – UHSA
Par exemple il nous est insupportable de voir ici ou là fleurir de nouvelles structures apparentées au service pénitentiaire : USIP –par exemple. Ainsi que la dérive, que nous voyons également se développer, de chambre d’apaisement pour contourner la règlementation concernant les chambres d’isolement.
Nous voyons aussi proliférer des expérimentations, inspirées par des concepts inadaptés, dénuées de prospectives nationales, dont l’évaluation ne fait pas partie du cahier des charges initial.
La psychiatrie doit retrouver son unité, sa spécificité médicale. Elle ne peut répondre à tous les « mal être » de la société, mais doit se recentrer sur les soins à apporter aux patients, le respect de leur dignité, sans tomber dans les demandes de dérive sécuritaire que la société pourrait être tentée de leur demander.
L’épidémie de COVID a mis en évidence le rôle des citoyens dans l’entraide, le pragmatisme et la solidarité. Le rôle des GEM (par et pour les usagers) a montré son efficacité et son adaptation. La combinaison des réflexions venant des instances et les pratiques venant du terrain (on the grass) doit permettre la mise en place d’une réelle politique de santé mentale, et d’une réponse médicale adaptée aux maladies psychiques et mentales. Ce sera la société et la psychiatrie de demain.
Le champ est vaste, difficile de résumer en 15 minutes. Mais la grande souffrance des patients et du personnel de soins montre que le chantier est devenu urgent. Même si on doit tenir compte des contraintes financières, il ne peut s’agir de petites mesures, mais bien d’une réelle réflexion avec tous les acteurs. Redéfinir le rôle et l’action de chacun, redéployer les structures, doit présider à ce changement.
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