Le GEM, une autre forme d’asile et d’aliénation aussi ? (article long)

Introduction général Resituer les GEM dans tout le maillage socio-sanitaire de la santé mentale

On ne pourra pas non plus faire l’économie de nous intéresser à la population des deux millions de personnes suivies par les CMP, les SAMSAH, les MDPH ou aux 850 000 personnes mises sous tutelle ou curatelle renforcée dont sont issus la presque totalité des Gémois. La majorité des Gémeurs quand ils ne sont pas suivis par le privé, ce qui reste une minorité, fréquentent un CMP, qui est souvent leur autre grand interlocuteur. La plupart des Gémeurs sont suivi par un CMP à raison d’une fois par mois, voire tous les trois mois, les moins « stabilisés », suivant la terminologie en vigueur, ayant même un rendez-vous tous les quinze jours. Une partie de notre étude va donc consister à étudier comment ces différents services travaillent main dans la main, se fréquentent à intervalles plus ou moins réguliers, même s’ils sont censés n’avoir aucun lien trop formel ou du moins être complètement indépendants les uns des autres. C’est l’injonction du Cahier des Charges de nouer des partenariats avec les structures sanitaires et médico-sociales qui est plus ou moins remplie selon les GEM, certains préférant avoir le moins de contact possible avec ce milieu qu’ils abhorrent. Tous les GEM ne participent pas aux grandes messes de la Santé Mentale et sur les trente collectifs qui participent chaque année aux semaines de la Santé Mentale, seuls la moitié comptent un GEM dans leur effectif. Un tiers des GEM qui pourraient être impliqués dans la manifestation y participent réellement.

Les GEMs têtes de pont de la prise en charge

Dans notre hypothèse, les GEM sont destinés à devenir la tête de pont du réseau de prise en charge des Gémeurs en tant que collectif, les autres continuant à être suivis par le système médico-social classique. Je dis bien collectif, car officiellement les GEM ne doivent pas faire de prise en charge individuelle, celle-ci devant rester l’œuvre des structures classiques, dans la répartition des tâches imaginée par nos bureaucrates. En fait, on s’apercevra rapidement que le GEM, s’il en a le temps (grosso modo s’il a deux animateurs à temps plein), va consacrer un temps considérable à répondre à des besoins individuels. Ainsi, au GEM de Margny où nous avons passé de nombreuses journées d’observation, nous avons pu voir que le Président et l’animateur du GEM étaient souvent la moitié de leur temps de travail en entretien individuel avec des gameurs pour des problèmes de logements, une entrée en ESAT…

ESAT, CATT, CMP, même combat

Dans notre étude nous avons choisi de comparer les GEM à ce qui semble les formes les plus proches des GEM, c’est-à-dire les Club House et les Club thérapeutiques (Association, autogestion, mise à distance du pouvoir soignant).

On pourra éventuellement élargir cette comparaison aux hôpitaux de jour, aux CATTP, ESAT fréquentés par quelques Gémeurs mais de façon moins fréquente (si les 3/4 des Gémeurs sont clients d’un CMP, seul un dixième environ fréquente chacune des autres structures et de façon plus ou moins régulière. De façon générale, les patients en hôpitaux de jours ou en CATTP ne sont pas encore considérés comme assez stabilisés pour pouvoir fréquenter un GEM (risque de crises, difficultés relationnelles, violence…). Quant au quelque 10 % de salariés protégés fréquentant un ESAT, ils ont rarement le temps de se rendre au GEM, hormis quand celui-ci est ouvert le W-E, ce qu’il doit faire officiellement deux fois par mois. Très rares sont les salariés qui ont le temps de s’y rendre plusieurs fois par semaine, condition indispensable à notre avis pour pouvoir être considéré comme un vrai Gémeur. La reprise d’une activité professionnelle est d’ailleurs une des principales causes de la sortie de GEM, avec la relation amoureuse, le retour à l’hôpital ou la reprise d’une addiction.

Un parcours bien balisé

Les GEM sont la suite plus ou moins logique d’un parcours psychiatrique qui a commencé entre les quatre murs d’un HP, pour se poursuivre ensuite de l’hôpital de jour au CATTP et se terminer définitivement dans un GEM, acte final du parcours psychiatrique avant l’éventuel retour à la vie civile. GEM et Club Houses proposent certes un concept beaucoup moins médical que les hôpitaux de jours ou les CATTP qui ne sont que la prolongation par d’autres moyens de l’IP, mais ils restent des outils de gestion psychiatrique. On peut même subodorer que c’est un peu pour désengorger les CMP que les GEM ont vu le jour. Il ne se passe pas d’ailleurs un jour ou deux sans que l’animateur de certains GEM proches des institutions médicales (alors que d’autres ont plutôt tendance à refuser le contact), soit obligé d’appeler le CMP pour un de ses adhérents.

Donc, paradoxalement, le GEM est censé n’avoir aucun rapport officiel et institutionnel avec le CMP et dans la réalité celui-ci est devenu un de ses plus grands interlocuteurs mais aussi sa soupape de sécurité. Il faut dire que la vie en CMP qu’a si bien décrite Livia Velpry a beaucoup changé depuis « Le quotidien de la psychiatrie » et l’adoption en 2011 de la loi sur les soins sous contrainte, les rapports entre usagers et soignants étant souvent devenus plus tendus. On comparera d’ailleurs avec beaucoup d’intérêt l’ambiance en CMP que décrit Livia Velpry et celle que nous avons pu observer sur le terrain (enquête de 2017 pour “Psychiatria Delenda Est”) avec une multiplication des salles de soins pour l’administration des injections retards, un engorgement toujours plus grand des salles d’attente (alors qu’en 2010 les rendez-vous s’obtenaient dans la semaine, il faut maintenant plus de six mois, souvent, pour en obtenir un).

On observe de fait un déplacement de population des CMP de façon générale vers les GEM, les CMP ne pouvant plus tenir le rôle de lieux de vie que certains avaient autrefois avec un espace café, un budget sorties, des infirmières à l’écoute… On a vu l’exemple sur la ville de Compiègne, notre terrain de pré-enquête où les rendez-vous dans le CMP étaient donnés quinze jours à l’avance en 2008 contre quatre mois à l’avance en 2018. À Angers, nos collègues d’Humapsy nous ont signalé la fermeture d’un CMP et d’un club thérapeutique, remplacé par des GEM. Dans plusieurs autres villes, c’est tout le budget activité du CATTP qui a été transférée vers le GEM. 

Pour aller plus loin :

Suite de l’article :

iS le bilan des GEM est globalement largement positif, cela ne dispense pas cependant totalement de certaines critiques de fond en prenant en compte la partie sombre du développement des GEM replacée dans l’évolution de la politique de santé mentale de ces dernières années. Les GEM peuvent être vu comme une forme de traitement au rabais : peu de professionnels, très peu payés (un animateur coûte 3 fois moins cher qu’un psychologue), recours systématique au bénévolat, mise au travail du patient qui désormais doit participer au soin-toilette de ses congénères (la fameuse pair aidance), faire lui même sa cuisine, ses courses,…

C’est pour éviter ce transfert des responsabilités des structures médico-sociales vers les GEM qu’il est à ce point fait référence dans les textes et les conférences au fait qu’ils ne doivent pas se substituer à une réponse professionnelle et qu’ils n’ont aucune prétention thérapeutique. Mais quand le CMP est surchargé et que le seul Hôpital de Jour ferme, c’est forcément vers les GEM que la population est obligée de se tourner.

La création des GEM s’inscrit dans un mouvement général de réduction des coûts de l’hôpital public, de transfert de ceux-ci au secteur médico-social ou de la volonté de casser la psycho-thérapie institutionnelle en évacuant tout le travail psy de longue haleine,….. adieu psychologues, entretiens infirmiers, bains moussants,… désormais on vous légumise avant de vous transférer dans un établissement de longue durée, antichambre de votre future EHPAD.

Le GEM lazaret moderne
A travers ces GEM on risque aussi non plus de soigner mais de stabiliser les ex-patients dans un état semi-végétatif, sans plus aucune ambition de rétablissement, en les parquant dans des sortes de Lazarets modernes où ils vont définitivement vivre à l’écart de la société et finir leurs jours. On peut se demander parfois où est le bénéfice quand on voit des gémeurs qui vivent depuis plus de 10 ans enfermés dans un train train plus ou moins malheureux entre chez eux et le GEM. Est-ce que finalement certains d’entre eux n’auraient pas été incité à retourner dans la vie réelle, si le GEM ne les avait pas fossilisés sur place. C’est d’ailleurs ce qu’avaient reproché certains soignants à la loi de 2005, de transformer une détresse psychique guérissable et temporaire en handicap permanent, entraînant une relégation de la société dans ces lazarets modernes. L’individu échange sa singularité d’homme libre contre la reconnaissance de travailleur handicapé et l’obtention de droits spécifiques.

Un parcours bien balisé

Les GEM sont la suite plus ou moins logique d’un parcours psychiatrique qui a commencé entre les quatre murs d’un HP pour se poursuivre ensuite de l’hôpital de jour au CATTP et se terminer définitivement dans un GEM, acte final du parcours psychiatrique avant l’éventuel retour à la vie civile. GEM et Club Houses proposent certes un concept beaucoup moins médical que les hôpitaux de jours ou les CATTP qui ne sont que la prolongation par d’autres moyens de l’HP, mais ils restent des outils de gestion psychiatrique. On peut même subodorer que c’est un peu pour désengorger les CMP que les GEM ont vu le jour. Il ne se passe pas d’ailleurs un jour ou deux sans que l’animateur de certains GEM proches des institutions médicales (alors que d’autres ont plutôt tendance à refuser le contact), soit obligé d’appeler le CMP pour un de ses adhérents.

Donc, paradoxalement, le GEM est censé n’avoir aucun rapport officiel et institutionnel avec le CMP, et dans la réalité celui-ci est devenu un de ses plus grands interlocuteurs mais aussi sa soupape de sécurité. Il faut dire que la vie en CMP qu’a si bien décrite Livia Velpry a beaucoup changé depuis « Le quotidien de la psychiatrie » et l‘adoption en 2011 de la loi sur les soins sous contrainte, les rapports entre usagers et soignants étant souvent devenus plus tendus. On comparera d’ailleurs avec beaucoup d’intérêt l’ambiance en CMP que décrit Livia Velpry et celle que nous avons pu observer sur le terrain (enquête de 2017 pour “Psychiatria Delenda Est”) avec une multiplication des salles de soins pour l’administration des injections retards, un engorgement toujours plus grand des salles d’attente (alors qu’en 2010 les rendez-vous s’obtenaient dans la semaine, il faut maintenant plus de six mois, souvent, pour en obtenir un).

On observe de fait un déplacement de population des CMP de façon générale vers les GEM, les CMP ne pouvant plus tenir le rôle de lieux de vie que certains avaient autrefois avec un espace cafet, un budget sortie, des infirmières à l’écoute… On a vu l’exemple sur la ville de Compiègne, notre terrain de pré-enquête où les rendez-vous dans le CMP étaient donnés quinze jours à l’avance en 2008 contre quatre mois à l’avance en 2018. À Angers, nos collègues d’Humapsy nous ont signalé la fermeture d’un CMP et d’un club thérapeutique, remplacé par des GEM. Dans plusieurs autres villes, c’est tout le budget activité du CATTP qui a été transférée vers le GEM. 

GEM , toutes les apparences de la démocratie Potemkine
Circulaire du 30 Mars 2007 “Les GEM sont créés pour favoriser l’autonomie des patients. Ce présupposé est incompatible avec une approche de type tutélaire qui entretiendrait une relation de dépendance.”

Il est dit et redit que les GEM sont des associations loi 1901. C’est même la condition sine qua non si on en croit le cahier des charges du CNSA pour être un GEM, qu’importe que vous ayez 6 adhérents comme le GEM de Tonneins (dans le Lot & Garonne) qu’il y ait des psychologues comme au Club des Peupliers ou que vous n’ouvriez que quelques heures par semaine comme Ecoute suicide à Nantes. Du moment que vous vous engagez à créer une association d’usagers dans les 3 ans, vous pouvez être un GEM : les chiffres date cependant du mois ou je les ai découverts, ils sont parfois susceptibles de changer très vite : quand j’ai rencontré François Bourges il avait 500 amis à tout casser, il dépassait les 3000 quelques semaines plus tard, idem pour Mamers et cie.

Il est très rare que des usagers qui se retrouvaient à la sortie du CMP soient eux- mêmes à l’origine de la création d’un GEM. D’ailleurs, seuls 13 % des parrains des GEM sont des associations d’usagers, contre 40 % d’associations de familles d’usagers et 20% au moins de structure médico-sociales. Et encore, on sait ce que ça veut dire “asso d’usagers” : Il s’agit bien souvent de groupes quand même très contrôlés par les institutionnels (exemple de l’association des usagers de Charenton, Esqui, dont le choix du président est fait par le psychiatre du précédent). Ce fut d’ailleurs un reproche assez permanent de l’association Advocacy, qui mit même en place un cahier de doléances en 2011 pour protester contre l’institutionnalisation des GEM.

L’étude de 2017 de l’Ancreai
Nous disposons de quelques éléments statistiques dans les rapports d’activité édités chaque année par la CNSA, qui montre que si les GEM n’étaient que 40% à être constitués sous forme associative, ils le sont aujourd’hui à près de 90%. Pour connaître la réalité de cette pratique associative on ne dispose cependant que d’une étude au niveau national, celle menée en 2017 par l’Ancreai. Elle souligne qu’une proportion importante des GEM étudiés (6 sur 25). se caractérise par une implication fortement directive du parrain ou de l’association gestionnaire. Cela veut donc dire moins d’autogestion mais cela peut présenter souvent un aspect rassurant pour les adhérents. Tous les adhérents de GEM ne sont pas demandeurs d’autonomie à tout crin.

D’ailleurs si le parrain ou le gestionnaire ne sont pas impliqués, c’est souvent l’animateur qui prend le dessus, avec des résultats guère plus reluisants en terme d’autonomie. Au vu de notre propre étude nous dirions qu’un autre quart sont gouvernés exclusivement par leur animateurs, un autre par un réel équilibre entre animateurs et membre du CA/président et seul un quart sont réellement autogérés, une bonne partie se passant d’ailleurs complétement de gestionnaire et s’administrant eux même;

L’argent le nerf de la guerre
La majorité des GEM sont gérés par un gestionnaire. Cela veut dire que l’association des adhérents du GEM va déléguer l’ensemble de la gestion financière et salariale du GEM à un organisme, une structure médico-sociale la plupart du temps.
En effet si les GEM sont obligés d’avoir un parrain, ils ont le droit en revanche de s’ auto-gérer. C’est eux dans ce cas là qui gèrent l’ensemble de la subvention de 77 000 Euros. Quand c’est un gestionnaire qui s’occupe de tout, il ne reste au final que 5 à 10 000 Euros par an qui seront gérés par l’association des adhérents.

Usagers mais pas trop
On est bien loin de l’image d’Epinal des usagers se réunissant en 1949 sur les marches de la bibliothèque de New York pour donner le jour au premier Club House Américain. Ce sont bien bien plus souvent des familles d’usagers, la fameuse Unafam, ou des structures médico-sociales qui répondent aux appels d’offre de l’ARS pour la création de nouveaux GEM. Et lorsque ce sont des usagers eux-mêmes qui veulent monter un GEM, ils se font très rapidement reprendre en main par les institutionnels locaux comme nous avons pu le voir récemment à Salon de Provence. A l’origine des personnes fréquentant le CMP local qui lancent un projet de GEM. On leur rit un peu au nez en leur disant que ce n’est pas très sérieux et l’année suivante Isatis qui possède déjà 3 GEM dans le département ouvre sa structure.
Pour dire vrai, nous n’avons jamais rencontré encore de GEM ayant été réellement mis en place par une association d’usagers ; celle-ci a toujours été créée spécifiquement pour répondre au Cahier des Charges ou bien a été à l’origine le fait de professionnels pour leurs usagers…. Pour une structure médico-sociale, le GEM est une vitrine sympathique, le truc nouveau qu’on peut facilement mettre en avant pour accroître sa surface, celui qui fera qu’on aura des articles dans la presse, qu’on pourra participer à la vie associative de la ville : monsieur le maire est souvent très content de ses nouveaux citoyens… C’est pas tous les jours qu’on à 75 000 Euros de budget en plus, multipliés par 3 ou 4 pour certains (voire 7 pour la Mayotte qui gère les GEM du 93 et du 95). Certes les structures médico-sociales, n’en tirent que 2 salariés de plus et 3000 Euros de frais de gestion par an…. Mais en terme d’image, c’est vendeur.

Une démocratie sous contrôle
Pourtant les choses ne sont pas aussi claires que ça et surtout on s’aperçoit qu’être déclaré en tant qu’association ne veut pas forcément dire grand chose en fait. Parce qu’en effet si le président et le conseil d’administration, tous les deux élus par les adhérents du GEM, exercent en effet un certain pouvoir, ce pouvoir n’est pas un réel pouvoir dans la majorité des cas. Et cela pour deux raisons principales :
• La présence de professionnels salariés qui règnent en maître d’autant plus qu’ils sont appuyés par un gestionnaire extérieur puissant qui a une naturelle tendance à considérer le GEM comme un de ses services, alors qu’il n’est qu’un prestataire de service.
• Le pouvoir du parrain qui de consultatif dans la majorité des cas, peut devenir coercitif -le parrain a toujours le moyen de reprendre le contrôle des choses s’il estime que ça se passe mal.Si certains parrains vont à fond dans le jeu de l’autonomie (comme Advocacy), d’autres gardent encore une vision doucement paternaliste de leurs grands enfants. Le parrain fonctionne alors comme une sorte d’organisme de tutelle.
Il faut dire qu’après une période relative anarchie, le nouveau cahier des charges de 2011 a donné un tour de vis très médico-social aux GEM, en leur imposant une série de normes et d’objectifs, qui ont du être corrigés dans le cahier des charges suivant de 2016.

Un animateur omniprésent
L’animateur reste très souvent l’élément central du GEM, celui qui impulse, celui qui propose, celui qui gère. Notre première année d’enquête nous a permis de fréquenter une bonne cinquantaine de GEM et d’assister à une dizaine de réunions de GEM. A chaque fois que nous prenons contact avec l’un d’entre eux c’est vers l’animateur que nous sommes orientés. Quant aux réunions, c’était invariablement l’animateur qui menait les discussions, même s’il faisait des efforts pour donner la parole au président. L’idéal, encouragé par le Cahier des Charges c’est le recrutement comme animateurs d’adhérents du GEM,toutes les conditions sont alors réunies pour que les adhérents aient le pouvoir. Mais ce n’est le cas que de 5% des GEM.
Nous échangeons souvent nos cartes de visite avec des présidents de GEM qui parfois en ont une. Mais lorsque nous appelons au téléphone c’est toujours sur l’animateur que nous tombons. C’est normal : c’est une carte de visite collective et le téléphone est dans le bureau de l’animateur. Mais quand même ….au début ça nous a fait quelque chose.
Cela dit il faut reconnaître, comme nous le disions précédemment, que dans certains GEM, souvent grâce au volontarisme du parrain, pour qui il est important que ses enfants grandissent, ce sont les adhérents qui ont le pouvoir final, celui de recruter l’animateur. Mais ces GEM se comptent encore sur les doigts de la main (Margny Les compiégne, L’Etoile Polaire, La Maison Bleue de Perpignan,…). Et ces GEM connaissent souvent alors les soubresauts de toutes les démocraties naissantes (coup d’état, violence ).

Exclusions et suicides
Les suicides dans les GEM
Il ne faut pas se leurrer, le suicide est une réalité à laquelle sont confrontés tous les GEM et même de façon répétée pour certains. L’animateur d’un GEM isarien me disait ainsi “toucher du bois” parce qu’il n’y avait pas eu de suicide réussi dans son GEM depuis un an et demi et rares sont les GEM où il n’y a jamais de suicide. Il suffit de consulter les rapports d’activités annuels des GEM pour s’apercevoir que beaucoup mentionnent la mort d’un ou plusieurs adhérents dans l’année.

Le suicide peut d’ailleurs y devenir une forme de chantage auquel est confronté tout président de GEM, chaque fois qu’il exclut un adhérent trop perturbateur. “Si tu m’exclus, je me suicide” est une phrase que nombre d’entre eux ont entendu au moins une fois dans leur vie et face à laquelle ils ont du évidemment garder tout leur sang froid. Les présidents eux-mêmes, confrontés à une pression à laquelle ils n’étaient plus habitués, décompensent assez souvent. C’est ainsi qu’en 2018 on a assistait à deux suicides de présidents de GEM dans les Hauts de France.
C’est à l’occasion de ces événements tendus que l’on mesure la difficulté d’extraire complètement les GEM de leur contexte psychiatrique : une coordination sera peut être nécessaire avec les équipes psychiatriques locales pour faire si nécessaire hospitaliser l’adhérent en perdition,…

Un counselling spécial pour les animateurs
C’est notamment pour faire face à ce genre de situation qu’il est important qu’un animateur de GEM puisse à intervalle régulier bénéficier d’un counselling : coaching ou séances de restitution pendant lesquelles les animateurs vont pouvoir discuter des cas difficiles qu’ils ont rencontrés et se décharger du poids de certaines situations problématiques. La plupart des structures médico-sociales qui gèrent 3 GEM ou plus ont mis en place des rencontres hebdomadaires pour leurs animateurs…. Ces séances souvent animées par des psychologues, le sont aussi parfois par des psychanalystes, comme à l’Oeuvre Falret dont tous les professionnels louent d’ailleurs le professionnalisme. C’est pour gérer ces épisodes délicats que la présence d’un parrain s’avère tout à fait essentielle : le président du GEM ou l’animateur sont parfois trop impliqués pour pouvoir agir de façon adéquate et détachée.

Quand les membres trop turbulents se font exclure de leur GEM

Ayant enquêté de façon approfondie auprès d’une bonne vingtaine de GEM en France, et si j’en crois mes interlocuteurs du CNIGEM ou d’ailleurs je peux dire qu’en effet il n’y a normalement pas plus de quelques exclusions par an dans un GEM. La vie dans un GEM n’est pas tous les jours un long fleuve tranquille. Il y a, et c’est la vie, des hauts et des bas, parfois tout le monde est calme, parfois cela s’excite, d’autant plus quand on se retrouve à 40 dans un local de 60 mètres carrés et que l’on se fréquente depuis de nombreuses années. Les GEM accueillant un public fragile et désocialisé, il est plus que normal que tout ne s’y passe pas toujours parfaitement bien. C’est pourquoi la plupart des GEM sont obligés à intervalles plus ou moins régulier d’exclure un membre violent. Ces exclusions sont la plupart du temps très temporaires, ne durant que quelques semaines. Tout est fait au contraire pour qu’elles soient le plus indolores possible . En effet un GEM doit pouvoir accueillir toute personne capable d’être à peu près autonome, même les cas les plus désespérés, quitte à ce que leur accueil ne se fasse que certains jours et uniquement en présence de 2 animateurs.

C’est pour prévenir cette violence d’ailleurs que le Cahier des Charges recommande de ne pas trop accueillir le public des sans domicile fixe, souvent habitué à une plus grande rudesse de vie.qui les rend plus que d’autres coutumiers de pratiques asociales et moins respectueuses des règles d’hygiène, toujours très mises en avant dans les GEM (on nous a raconté le cas d’un GEM qui refusait des personnes n’ayant pas mis de parfum,…).

L’exclusion définitive
Il arrive pourtant dans certains GEM (dans celui de Fontenay aux Roses (Hauts de Seine) ou à Janus ( Montpellier) et à la Maison Bleue de Perpignan, que les exclusions soient prononcées à vie. Une pratique que réprouvent fortement les ARS dans la mesure, où exclure un membre d’un GEM c’est renforcer l’exclusion d’un exclu, le désigner comme un psychopathe irrécupérable. Les GEM fortement excluants sont gérés par les adhérents avec une faible présence des professionnels qui sont les seuls souvent à pouvoir garder suffisamment de recul. Sylvain Bourg, animateur du GEM Micro-Sillon a consacré en 2018 son mémoire de DEIS (Diplôme d’Etude en Ingénierie sociale Toulouse Jean Jaures) à la comparaison de 2 GEM, l’un ayant un animateur professionnel et l’autre un animateur adhérent. Il montre à quel point l’animation est beaucoup plus chaotique dans le second GEM que dans le premier. Nous avons pu observer au quotidien et au long cours le phénomène dans le GEM l’Etoile Polaire de Paris où nous disposons d’un informateur, l’association animateur adhérent + forte proportion de bipolaires donnant un aspect particulièrement rock’n roll avec démission collective régulière du Conseil d’Administration, exclusions temporaires à la chaîne. Malgré cela, ce GEM tient mordicus à avoir un animateur adhérent, seul à même à faire vivre le GEM avec empathie. C’est plus dur, mais c’est le prix de la liberté.

Trop d’exclusions, qui plus est définitives, ça montre forcément qu’il y a un problème de gouvernance: dans le recrutement des membres (normalement on fait comprendre à la moitié des gens qu’on accueille qu’ils n’ont pas leur place dans le GEM ou on leur montre suffisamment les spécificités du GEM pour qu’ils n’aient plus envie d’y adhérer.

Le parrain pour recadrer le président en dernière instance
Le noeud du problème peut se situer au niveau du désir de toute puissance du président qu’il va satisfaire en excluant tous les membres qu’il souhaite, “au bon plaisir du roi”. Ce désir de puissance peut également s’exprimer par une sexualité débridée. Dernier cas : la tendance au somptuaire, mais c’est un autre problème et on ne peut pas reprocher à un président de vivre dans le luxe que lui impose son statut social.

Dans ce cas là, et si le bureau du GEM ne réagit pas, la seule solution est de faire appel au parrain pour qu’il temporise ou si cela s’avère nécessaire l’oblige à démissionner ou le fasse enfermer (cas de figure pas si rare que ça). Le parrain est dans le cas d’un président défaillant (ou ne lui plaisant pas s’il a le soutien d’une partie du CA du GEM), en droit de reprendre temporairement le pouvoir, le temps de que’lques mois pour remettre le GEM sur de bons rails.

Extrait du réglement intérieur du GEM Arlequin (Lyon) document datant de 2012
ECHELLE DES SANCTIONS

29)-Le règlement intérieur prévoit que des sanctions puissent être appliquées en cas de non-respect de ce dernier. Une échelle de sanctions a été réfléchie afin de ramener de la mesure dans les échanges au sein du G.E.M et garantir à chacun un cadre agréable.
Selon la gravité des événements et des incidences sur les personnes participants à la vie du G.E.M, les sanctions peuvent être un avertissement oral, un avertissement écrit, une demande de retrait du groupe pour une durée définie ou définitive. Parce que nous savons que certaines périodes peuvent être plus difficiles à gérer, et afin de prévenir une aggravation de ces situations, des démarches propres à soutenir les adhérents en souffrance ont été réfléchies par l’ensemble des adhérents :Dans le cadre d’un regard bienveillant porté sur l’ensemble des adhérents, l’animatrice est mandatée par eux pour prévenir une montée possible d’agressivité de la part d’un adhérent en souffrance.Elle devra soutenir tout adhérent en difficulté par les échanges qu’elle aura avec lui. Si ceux-ci ne pouvaient suffire à ramener de l’apaisement, elle aura à rappeler à l’adhérent que la fréquentation du GEM implique une stabilité émotionnelle propre aux échanges. Au-delà de la nécessité de deux rappels au calme, elle devra signifier à l’adhérent qu’il doit suspendre sa fréquentation du GEM jusqu’à ce que celle-ci puisse être apaisée.

30)-L’ambiance au sein du GEM et le respect du règlement impliquent tous les adhérents.Dans le cadre de cette responsabilité partagée, c’est à eux de voter la sanction appropriée.Ils pourront soumettre leur décision aux membres de Luciole qui en apprécieront à leur tour la justesse et en seront garants. L’animatrice veillera à son application.”

Le GEM devenu fou
Ca ne se passe pas toujours bien dans un GEM. Tous les GEM sont un jour ou l’autre plus ou moins partis en vrille. La plupart de simples disputes et parfois une bagarre générale. C’est la vie, d’autant plus dans une population à vif psychologiquement, dont l’activité principale consiste à discuter, voire à discutailler, à s’intéresser à la vie privée des uns et des autres. L’oisiveté est parfois mère de tous les vices….
Certains GEM sont ainsi parfois obligés de se passer d’animateur pendant plus de 6 mois, que ce soit la faute de l’animateur lui-même ou d’un gestionnaire défaillant. Un dixième des GEM d’ailleurs changent chaque année de gestionnaire et/ou de parrain. Beaucoupferment alors leur porte, mais certains essaient tant bien que mal de fonctionner en autonomie totale.
Le GEM qui fait faillite
C’est le cas d’un GEM à Montpellier qui a du fermer ses portes pendant une semaine, s’étant trouvé sans gestionnaire (le contrat du gestionnaire avait été résilié avant même d’en avoir trouvé un nouveau). La tension était telle qu’un psychologue a été dépêché sur place et que le GEM est désormais obligé de fonctionner avec la présence de 2 animateurs. Le GEM TC de Clermont Ferrand, bien qu’il ait toujours gardé ses animateurs, a du être fermé à plusieurs reprises, faute d’avoir un gestionnaire suffisamment conciliant et présent. Quant au GEM “Nord Mentalité” à Tourcoing, il attend sa mise en liquidation judiciaire à l’heure où nous écrivons ces lignes. Quant à ses deux animatrices elles l’attaquent aux Prud’hommes pour licenciement abusif. C’était pourtant un des GEM les plus connus de France grâce à son emblématique président Claude Ethuin, jusqu’à ce que des affaires de harcèlement sexuel et la mort du président ne viennent ternir l’année 2018. Autre GEM de la Fnapsy, qui été présidée par Claude Finkelstein, elle même, celui d’Aix a du fermer ses portes début 2019.

Nous avons rencontré plusieurs GEM où des plaintes (pour violence ou agression sexuelle avaient été déposées entre Gémeurs, voire même entre animateurs et Gémeurs. Dans certains d’entre eux la réaction du gestionnaire dont la responsabilité est engagée est immédiate : la fermeture du GEM le temps que la justice fasse son travail : ce n’est pas pour les 3000 Euros que lui “rapporte” le GEM par an, qu’un gestionnaire avisé va mettre en question la réputation de sa structure médico-sociale.
Une fois ce fut un problème technique (une porte ne fermant plus), la fois suivante, une menace de procès d’une Gémeuse contre un autre Gémeur. Il arrive d’ailleurs régulièrement qu’un GEM me dise que c’est pas le moment que je lui rende visite parce qu’il est trop occupé ou dans une phase trop tendue.

Certains GEM connaissent une existence plus ou moins chaotique, changeant d’animateur tous les 6 mois, fermant ses portes pendant quelques mois, le temps de trouver un autre animateur. Et puis un beau jour ils finissent par trouver leur rythme de croisière…ou pas. C’est ce qui est arrivé au GEM mille et Une vie d’Arnouville (95), qui de 2009 à 2014 a connu une existence par intermittence avant de finalement se stabiliser…en grande partie grâce au recrutement d’une animatrice expérimentée en provenance d’un GEM voisin.

5% des GEM en déshérence
Pour remettre à jour l’annuaire de Mut-GEM nous avons fait une campagne téléphonique et par mail, rappelant trois fois à quelques jours d’intervalle les GEM qui ne répondaient pas. 10 % des GEM n’ont jamais répondu au téléphone et la moitié ne répondaient jamais aux E mails. C’est finalement en nous rendant sur place où en questionnant des Gémeurs locaux que nous avons pu apprendre que le GEM ouvrait quand même son local, même s’il ne faisait plus grand chose d’autre. Nous avons donc pu constater que 5 % d’entre eux ne donnaient aucun signe de vie, nous pouvons estimer qu’ils n’existaient donc plus à l‘heure où nous avons pris contact avec eux.

La maltraitance dans les GEM
Les animateurs maltraités et ou en Burn-out:

La plupart des animateurs de GEM que l’on peut rencontrer étaient satisfaits de leur travail a part 3 ou 4 qui avaient l’air particulièrement stressés, 2 ou 3 qui se battaient avec leur gestionnaire, leur président, leur parrain ou leur ARS, voire le maire de la ville, et les 10 % de GEM qui répondent que ce n’est pas le moment de leur rendre visite. On m’a beaucoup parlé du Brun Out, mais je l’ai peu vu directement à l’œuvre à l’œuvre.

J’ai appris hier qu’un de mes animateurs de GEM favori était en arrêt maladie depuis plusieurs mois.Comme d’habitude personne ne sait ce qui lui arrive. En tout cas c’est clair que les burn-out sont assez fréquents chez les animateurs de GEM les moins aguerris, pour peu que le GEM ait des problèmes d’argent, que les parrains et gestionnaires soient lointains, que les relations ne soient pas au beau fixe avec le président-adhérent…. Le GEM en question continue cependant de tourner bien qu’il n’ait depuis 2 mois que des stagiaires en guise de professionnels et le support hebdomadaire d’un GEM voisin. C’est du un peu au Cahier des Charges qui consacre la toute puissance des adhérents. N’ayant plus forcément l’habitude du monde du travail, avec en plus parfois un sentiment de toute puissance, certains Présidents de GEM peuvent se croire un peu tout permis. C’est du un peu au Cahier des Charges qui consacre la toute puissance des adhérents sur les professionnels.

Quand l’animateur et le président ne s’entendent plus
Dans la majorité des cas la cohabitation entre le président d’un GEM et son gestionnaire se passe relativement bien. Il y a certes des petites tensions un peu tous les jours, des animateurs qui ne font pas toutes leurs heures, des frais qui ne sont pas remboursés assez vite, des budgets loisirs qui se réduisent comme peau de chagrin.…

Des animateurs pas toujours très gentils
De façon générale il règne toujours une bonne ambiance dans les GEM. Mais on trouve toujours quelques signes de tension chez certains gémeurs. C’est d’ailleurs souvent en tant que visiteur extérieur que je suis sollicité. Entre adhérent d’un même GEM on hésite parfois à se plaindre. Le visiteurs extérieur lui est moins impliqués, moins souvent là, donc c’est plus facile de se plaindre. Les adhérents se font souvent rabroués pour avoir pris des initiatives qui d’après les animateurs engage le GEM et auraient du être discuté au Bureau du CA. C’est ainsi que plusieurs fois des gémeurs se sont fait grondé par l’animateur pour m’avoir invité dans leur GEM, ou pour voir fait venir un journaliste. Les outils censés aidé à la démocratie comme le Bureau du CA se retournent alors en faite contre les adhérents puisque c’est en leur nom qu’ils se voient interdire la moindre initiative. C’est pour cela d’ailleurs que le Cahier des Charges rend facultative la présence de l’animateur lors des réunions de bureau, de même qu’il ne donne qu’une voix consultative au parrain. Mais de fait elle a beau être facultative, la voix du parrain porte haut et aura souvent nettement plus de poids que celle du président.
De nombreux GEM, dans un louable souci de confidentialité, interdisent ainsi à leurs gémeurs toute publication Facebook relative à la vie du GEM. D’autres mettent suffisamment la pression sur leurs adhérents ( « nous le ferez à vos risques et périls, vous serez pénalement responsables) pour que ceux-ci n’osent jamais ouvrir en autonomie, droit pourtant largement encouragé par le Cahier des charges.
Mais l’animateur peut également brider un adhérent, parce que celui-ci prend trop de poids dans le GEM, empêchant ainsi les autres de s’exprimer ou de participer. Le rôle de l’animateur sera alors forcément mal perçu par l’adhérent trop présent, mais sera nécessaire pour la communauté.
« J’ai assisté hier à ma première réunion de CA et je suis effaré ! L’animatrice a monopolisé la parole tout le temps qu’a duré la réunion, qui abordait les conditions de réouverture du GEM, et personne ne la contredisait, sauf moi, un peu timidement je dois l’avouer. Elle a même osé dire qu’elle et l’animateur prenaient des décisions sans avoir à consulter le CA ! Silence de la présidente… Ils sont tous les deux salariés, non pas par le GEM, mais par le gestionnaire, Croix Marine, qui via ses animateurs est hyper intrusif dans la gestion de l’association.
Je comptais me présenter comme trésorier lors du prochain CA qui doit normalement désigné le prochain bureau (le trésorier actuel est un homme de paille, prof dans le civil, qui ne vient qu’une ou deux fois par an pour l’AG et le CA qui désigne le bureau), histoire de mettre mon nez dans la comptabilité, qui a mon avis n’est pas très claire, mais maintenant j’hésite à me mouiller. Il faut dire que je bénéficie de la banque alimentaire, et que comme tout ceux qui en bénéficient, je suis plus ou moins “tenu” par ça pour l’ouvrir ! Et comme il y a déjà eu deux précédents d’adhérents qui ont osé s’opposer à la dictature de l’animatrice (dont un qui est allé jusqu’à interpeller le ministère, sans résultat), à part attaquer de front quitte à ne plus venir au GEM si ça tourne mal, ça me met en porte-à-faux. Voilà la situation dans “notre” GEM (qui est le “nôtre” quand ça arrange…)

Cas N°1 : c’est l’animateur qui gagne
Un président seul contre tous

Mais parfois cela peut virer au drame comme ce qui s’est passé avec l’ancien président du CNIGEM qui a été viré de son GEM pendant l’été 2018 et a du donc être remplacé par un président par intérim au CNIGEM, le fameux François Bourges. Cela vient de se passer au GEM autiste de Bordeaux qui était jusqu’à récemment présidé par le pianiste virtuose et autiste asperger William Theviot.
Mais celui-ci s’est rapidement montré un peu trop indépendant/individuel et s’est opposé aux méthodes de l’animateur qui militait plus semble-t-il pour un partage des pouvoirs. On a beau avoir la légitimité démocratique, on n’a pas celle des institutions et celle-ci sont toutes puissantes lorsqu’il s’agit de mettre à terre un individu, fut-il président. Une faille de plus sur le rôle des présidents de GEM et de la difficulté d’autonomiser réellement les GEM dans un contexte qui reste encore très médico-social et avec une vision paternaliste des neuro-atypiques.
Dès le début de notre enquête, à travers le GEM de Margny, nous nous étions aperçus à quel point le président était dominé par les institutionnels : “tu es président à l’intérieur, mais à l’extérieur c’est nous qui reprenons le pouvoir.” Il était en l’occurrence question que le président représente le GEM lors d’un débat sur un film, chose que son parrain lui a interdit, mettant également fin à la bonne collaboration que nous avions entamée.

Un président en vacance ou démis de ses fonctions ?
Le dossier est complexe. Chacun proteste de sa propre bonne foi. “C’est William qui est en vacance de présidence, c’est pour cela que nous avons du élire un président par intérim pour signer les papiers et continuer d’assurer le bon fonctionnement du GEM.”
On se retrouve là aussi peut être un peu dans le cas d’un président surdimensionné, par rapport à la mission que voulaient lui faire jouer les institutions, mais aussi par rapport au reste du public du GEM. “Ils se sont dit chouette un pianiste virtuose, c’est bon pour l’image du GEM, ils n’ont pas tout de suite réalisé que cela voudrait dire quelqu’un d’exigeant et de sur de lui.” N’oublions pas que le Cahier des Charges lui- même écrit que les adhérents sont un public fragile et vulnérable. Si même les grands penseurs de la CNSA le pensent, il est légitime pour une petite structure médico-sociale de se dire : fragile, vulnérable….donc docile. Il faut voir aussi que tout cela s’est passé très rapidement : quelques mois après la création de l’association. Il est souvent normal que les débuts soit chaotiques et nécessitent de laisser du temps au temps : les choses ne se seraient pas naturellement arrangées au bout de quelques mois ?

Un président sous contrôle
Il est certain en tout cas que le président du GEM s’est rapidement retrouvé pris dans un système dont il n’était qu’un rouage (“on me faisait signer des papiers vierges”) et que plutôt que de jouer le rôle de bon petit handicapé de service, il a préféré prendre ses distances. Ces clashes entre Présidents de GEM et gestionnaires sont légion comme nous le disions précédemment. C’est dans ces cas là que le parrain a un rôle important à jouer en ré-affirmant la pré-éminence des adhérents sur le gestionnaire. Ce qu’il n’a pas pas fait en l’occurrence à Bordeaux, puisque parrain (Asper33) et gestionnaire tous deux purement locaux, semblent être trop proches l’un de l’autre, ce qui est d’ailleurs le cas dans de nombreux GEM, puisque la séparation parrain/gestionnaire n’y est que cosmétique. Au lieu de venir dire la justice comme l’aurait fait un parrain national comme la Fnapsy, le parrain local, qui n’est qu’une branche du gestionnaire (ou a beaucoup moins de pouvoir), obéit à ce dernier au doigt et à l’œil. Si le GEM avait été parrainé par la Fnapsy, parions que Claude Finkelstein n’aurait pas hésité à convoquer une AG extra-ordinaire et à traverser la France pour sauver “ses gens”.

Cas N°2 C’est le président qui gagne
Autorité du Président de GEM & droit du travail : de la co-construction à la carabistouille
Décidément c’est dur de faire respecter les Présidents de GEM et le droit du travail en même temps. D’un coté des élus du peuple, de l’autre des salariés plus ou moins précarisés qui n’acceptent pas forcément d’être entièrement subordonnés aux choix d’un Conseil d’Administration aussi lunatique que peu professionnel.
Il suffit la dessus que l’on interprète de façon un peu trop littérale le Cahier des Charges et l’animateur devient très rapidement le jouet du GEM, celui sur lequel les gémeurs vont pouvoir tout faire passer. Rajouter la dessus une conception très régime présidentiel de la Présidence d’un GEM (à l’image du Président de la République, alors qu’un Président d’association ne doit être que la voix du CA) et vous avez tous les éléments pour arriver à une situation explosive (cf le cas du GEM de Niort que nous avions exposé en septembre dernier).
Et tandis que l’animateur en prend plein la gueule et l’amour propre, c’est au gestionnaire, leur patron, mais simple prestataire de service pour le GEM de payer l’addition : le droit du travail c’est lui que cela concerne.

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