Pourquoi si peu de jeunes dans les GEM

Jerry Rubins ” Ne faites jamais confiance à un individu de plus de 30 ans ” Do it 1973

Une des premières choses qu’on remarque en allant dans un GEM, c’est que la population y est relativement âgée, avec une moyenne d’âge proche de 50 ans. “S’il est difficile d’établir un « profil-type » de l’adhérent du GEM, l’étude de l’Ancreai, menée sur vingt-cinq GEM, dégage quelques tendances. Tout d’abord les utilisateurs des GEM sont majoritairement âgés de 45 à 50 ans. Cette moyenne d’âge élevée s’explique, pour les publics présentant un handicap psychique, par la nécessité de stabilisation des troubles pour pouvoir intégrer le GEM.

Toujours la même rengaine dans le Cahier des Charges sur le fait que si il n’y a pas assez de jeunes dans les GEM, c’est qu’ils sont trop fous. Moi je crois surtout que c’est du au fait que les GEM sont pleins de vieux et que quand t’as 20 ans, t’as pas envie de te retrouver avec des vieux croûtons plus ou moins amochés par la vie, s’il n’y pas de projet fort derrière : les parties de cartes ont préfère les faire entre amis.

Avant 40 ans les jeunes psychotiques (ou PSHP) sont encore à la fois rebelles et plein d’espoirs d’insertion dans la société. C’est quand ils commencent à ne plus bénéficier du soutien familial (et oui même les encartés de l’Unafam finissent au cimetière). C’est d’ailleurs pour ça que les GEM ont été créés en 2005 : pour assurer un avenir aux enfants des adhérents de l’Unafam, une fois que ceux-ci iraient respirer l’odeur des pissenlits.

C’est donc, tout d’abord les plus de 40 ans, ceux qui en avaient le plus besoin qui ont investi les GEM, déterminant ainsi la personnalité du GEM. Une fois un noyau dur de personnes de 40 ans installé dans un GEM, souvent pour au moins 4 à 5 ans, c’est très difficile de faire venir une nouvelle population.

Les jeunes et les GEM, un rendez vous raté

Il y a une eu aussi sans doute une volonté d’orienter à tout prix les jeunes vers le marché du travail, les GEM étant perçu comme le lieu de ceux qui ne peuvent pas travailler et donc s’insérer. Pourtant nous sommes persuadés qu’ils pourrait y avoir des GEM jeunes, peut être plus orientés Club House ou s’inspirant des méthodes du Prepsy.

A cela une exception les GEM autistes qui accueillent un public beaucoup plus jeune (30 ans de moyenne d’âge), ceci étant dû aux particularités de l’autisme, qui est très tôt pris en charge, mais qui passé 18 ans et l’Institut Médico Educatif (IME) n’avait pas de structures d’accueil qui lui soient propres. Les GEM de Brest (et d’Angoulême parfois) accueillent même de jeunes ados, alors que les GEM sont toujours réservés à un public majeur.

Il n’existe à notre connaissance que trois GEM non autistes spécifiquement jeunes et réservés aux moins de 30 ans : celui de Montauban, celui de l’Entre Deux à Rennes (voisin de l’Autre Regard), celui de Tonneins dans le Lot & Garonne, créé en 2019. La politique du GEM de Rennes est assez originale puisqu’après 30 ans, le Gémeur est invité à se rendre dans le GEM des vieux, sauf s’il a fait partie du Conseil d’Administration du GEM.

Le GEM de Nantes aussi accueille beaucoup de moins de 30 ans, grâce aux fêtes qu’il organise régulièrement. On trouve pourtant dans de nombreuses villes des lieux d’accueil pour jeunes qui auraient pu aisément se transformer en GEM. Mais la plupart ont préféré ne pas franchir le pas, notamment pensons nous pour garder leur personnel soignant, les GEM étant faits quelque part pour des gens qu’on ne soigne plus.

Pour aller plus loin :

• Présentation du Pass Murail de Bordeaux qui accueille les 18/25 ans mais qui n’est pas un GEM
• Transition à l’âge adulte des jeunes souffrant de troubles psychiques CNSA 2018 2020
• Delporte Muriel et Chamahian Aline Le vieillissement des personnes en situation de handicap. Expériences inédites et plurielles Gérontologie et société 2019/2 (vol. 41 / n° 159), pages 9 à 20
• Jovelet Georges Ces psychotiques qui vieillissent – John Libbey 2017
• « Bien vieillir avec un handicap psychique », Pratiques en santé mentale, 2020/1 (66e année), p. 30-33. DOI : 10.3917/psm.201.0030.
• Delporte Muriel, « Soutenir l’expérience du vieillissement », Pratiques en santé mentale, 2020/1 (66e année), p. 34-39.