Premiers échanges sur la Thèse avec François Sicot (Université Toulouse Jean Jaures) 16/07/18

Sur la méthode, il y a celle que vous avez adoptez jusqu’à présent pr satisfaire votre curiosité ou
écrire vos ouvrages etc. C’est différent de la méthode qu’il faudra arrêter en fonction de l’objet de
la thèse. Et enfin, je ne parlerai pas de la manière dONt vous participez aux GEM, vOUs faites interner etc mais il y a bien un moment où il faudra rendre compte des méthodes que vous utiliserez . Ce sera écrit et
public.


J’ai moi même tendance parfois à ne pas m’embarrasser des procédures, des questions de
consentement, de ce sur quoi porte effectivement ma recherche… considérant que je mène mes
enquêtes pour le bien des enquêtés. Tout en sachant que c’est une position intenable. Qui suis-je
pour dire que je sais ce qui est bon pour les malades ? Il y a là des pbs de trois ordres :
déontologiques, éthiques et proprement méthodologiques (que vaut scientifiquement ce que
j’obtiens de telle ou telle manière)

Mes méthodes d’enquête :
Etre son propre objet d’étude
Il y a tout un travail d’auto-analyse Et si on était fou soit même… J’ai connu comme beaucoup de
personnes un internement psychiatrique qui m’a traumatisé, des période de dépression ou
d’exaltation, quelques rares hallucination. J’ai même été quand j’étais jeune était qualifié de
psychotique avant que des contrexpertise parlent plutôt d’HP ou de surrefficience. Je suis d’ailleurs
à priori totalement inadapté au monde du travail salarié en environnement non stimulant à plein
temps, ayant surtout été free lance. C’est toujours intèressant de se demander pourquoi finalement
on a pas été psychiatrisé. Se mettre dans la peau d’un fou, essayez de comprendre ce
dysfonctionnement psychique et les raison de son apparition et essayer d’expérimenter ce qu’ils
endurent, fait donc parti de mon travail de base. J’utilise mes propres caractéristiques psychiques
pour mieux me faire accepter comme patient. Personnalité de structure bipolaire (mais n’ayant ni
phase maniaque ni phase dépressive), fonctionnant sans doute sur un substrat de personnalité
borderline. Je peux assez facilement passer ou me faire passer pour un fou. Une certaine pratique du
théâtre et de la duplicité m’aident également dans cette démarche. Empathie et affection, voire
regard attendri, me sentant assez proche de leur démarches ou pulsions artistiques….
C’est d’ailleurs ce que j’essaie de faire dans mon approche : ni fou, ni pas fou (entre les deux
plutôt), ni expert ni complètement innocent… Je reste relativement flou sur les raisons de ma
participation à ces groupements communautaires, me présentant tantôt comme usager de la
psychiatrie, tantôt comme simple sympathisant ou comme « m’intéressant au sujet ». De toute façon
les gens ne me posent pas trop de question. « Contente toi d’être avec nous, nous sommes contents
que tu sois avec nous » me dit-on souvent. Le problème ce sont plutôt mes partenaires insiders
appartenant aux différentes institutions fréquentées et qui eux peuvent se trouver en porte à faux
professionnellement. Si leur rôle a principalement consisté à appuyer mes démarches et à participer
à l’organisation des supercheries, ils ont du également parfois créer des pièces plus ou moins
fausses voire des témoignages partiels.


Se promener
Je n’ai aucun problème pour rendre publiques mes méthodes d’enquête : la plupart sont banales
quant aux autres, elles ne sont pas forcément illégales, le but du jeu étant justement de flirter avec
les limites autorisées. Ma méthode c’est beaucoup d’enquête et d’observation de terrain en tant que
sujet naïf qui se promène un peu partout où il peut rentrer ( GEM, hôpital, le couloir d’un HP ou les
jardins de Sainte Anne) et provoque des situations en essayant de les mener le plus loin possible
avec le maximum de vécu(on parle toujours mieux de quelque chose que l’on a vécu, que l’on est
capable de décrire de façon « sensible »).. Jusqu’à présent j’ai du fréquenter une bonne centaine
d’hôpitaux psychiatriques, ESAT, CMP, appartements thérapeutique et quelques milliers de fous…
J’ai également constitué un groupe de 6 de personnes (1 psychologue, 1 psychanalyste, 2
9 Stefan Jaffrin Proposition de Projet de Doctorat pour le Professeur Francis Sicot 16/07/18
sociologue, 1 éducatrice spécialisée, 1 infirmière psychiatrique) avec qui je discute du sujet au jour
le jour et qui qui me facilitent la tâche. L’autre aspect de ma démarche pourrait s’apparenter à celle
des YesMen qui au début des années 2000 inventèrent de fausses entreprises et de fausses Start-Ups,
pour mieux tourner en ridicule l’économie contemporaine et sa démesure capitaliste
(https://en.wikipedia.org/wiki/The_Yes_Men) ses malentendus ou les erreurs de diagnostic des soit
disants spécialistes. Elle peut se révéler un peu plus problématique dans la mesure ou j’y utilise
parfois quelques subterfuges. Le véritable problème que mon activité militante n’influe sur mon
travail d’enquête et mon rapport au terrain. Autant faire que mes interlocuteurs me prennent pour un
interlocteur, un usager ou un professionnel lambda. C’est une décision à prendre assez rapidement
parce que je ne vais pas pouvoir forcément resté très longtemps un sujet naïf et sain d’esprit aux
yeux de mes interlocuteurs.
Exemple de dossiers en cours : arriver à se constituer un dossier « adulte handicapé », être
hospitalisé dans un pavillon pour psychotiques chroniques ou dans un service de psychiatrie
pénitentiaire…. Cette méthode m’a été grandement facilitée par le fait qu’il est très facile de
devenir patient d’un service psychiatrique : on y rentre comme dans un moulin, même si le plus
difficile reste, quand s’y fait enfermer (et même en hospitalisation libre) ensuite d’en ressortir. Un
psychiatre quand on s’adresse à lui, pense forcément qu’on vient le consulter et il est toujours super
content d’avoir de nouveaux clients. J’ai ainsi réussi a à me faire interner 4 fois quelques jours au
cours de l’année passée en addictologie à Paul Brousse (excellent service du Professeur Benyamina)
puis aux urgences Psychiatriques de Compiègne, de Clermont de l’Oise, de Saint-Nazaire puis de
Sainte Anne.


Jai tendance à me placer du côté des patients, plutôt que du côté des soignants, puisque ce sont eux
et leurs éducateurs, voire psychologues, mes interlocuteurs… Je m’intéresserai évidemment donc
beaucoup au vécu et au combat contre de la maladie (chose indispensable évidemment quant on
travaille au quotidien avec des “malades”). Mais là encore une fois cela risque de l’être plus dans
une perspective théorique que descriptive. Généralement après quelques jour passé dans un « GEM
et autres Clubs » je deviens autant une personne ressource qu’un usager.


Première approche du Terrain
Pour l’instant j’avance à pas comptés pour ne pas pas déflorer le sujet trop vite, ne pas provoquer de
levée de bouclier ou de réaction hostile qui pourrait nuire à mon travail futur. Je ne fais que de
fugaces apparitions, battant vite en retraite. Essaye de ne pas trop laisser mon nom, n’ai quasiment
pas rencontré de psychiatres pour discuter de mes thèses avec eux. Les seuls que je rencontre c’est
pour les consulter en tant que patient. J’ai commencé à me faire une petite centaine d’amis facebook
et In Real Life à la fois parmi les usagers, le personnel soignants et les acteurs du domaine social,
en appliquant des méthodes de dynamique de groupe et d’observation expérimentale (comment il
réagissent aux infos, comment ils régissent entre eux ou interragissent avec moi,…)
Pour l’instant le terrain sur lequel j’ai surtout travaillé c’est l’Oise, en utilisant mes réseaux «Action
sociale Migrants & Précaires (Croix Rouge Française, Secours Catholique, Camion du Coeur,
travailleurs sociaux,…) pour essayer de comprendre et de pénétrer le système de l’intérieur. Je n’ai
10 Stefan Jaffrin Proposition de Projet de Doctorat pour le Professeur Francis Sicot 16/07/18
pas de contact en tant que chercheur ou écrivant sur la psychiatrie avec les psychiatres (hormis
Hubert Hervé de l’Elan Retrouvé), tous mes contacts étant du personnel paramédical (aide
soignante, infirmières,…)des travailleurs sociaux (assistantes sociales, éducateurs spécialisés,
moniteurs) et quelques psychologues.


Mes actions militantes, outre la publication du livre «Psychiatria Delenda Est» concernent la
coalition against psychiatric assault canadienne et le Weblog, Zinzinzine.net. Ce qui va sûrement
me conduire à agir sous deux identités différentes, celle du chercheur(Stefan Jaffrin)et celle du
militant(Dr. Livingstone par exemple). Publier mon ouvrage sous un pseudonyme ou au nom d’un
collectif. Je suis prêt à publier ou à agir sous pseudonyme aussi longtemps qu’il le faudra. Cela ne
me pose aucun problème et j’y suis habitué depuis 25 ans.

Un sujet connexe : la sociologie des associations, collectifs et autres lieux militants de la santé
mentale

Il y a toute une effervescence d’associations (Advocacy, CRPA, Psy, soins & Accueil, Collectif des
39,…) dont beaucoup ont vu le jour après les lois sécuritaires de 2011. Il pourrait être intéressant de
leur consacrer un petit chapitre. Il y a aussi le cas très particulier de la région autour d’Amboise,
berceau de la psychothérapie institutionnelle (avec La Borde, mais aussi les cliniques de la
Chesnaie (la plus dynamique avec son École de Psychiatrie institutionnelle). De très nombreux
Clubs Thérapeutiques ont vu également le jour dans un périmètre extrêmement restreint (entre 10 et
50 kilomètres séparent chacune de ces institutions), comme en témoigne le dynamique mouvement
inter club et inter GEM


L’apprenti-Chercheur et le psy en devenir
Ce travail de recherche va nécessiter tout un apprentissage de ma part, ne serait-ce qu’en
psychanalyse, psychothérapie, médication, neurosciences et comportementalisme, voire de devenir
un peu éducateur ou assistante sociale et de suivre une formation à la gestion du handicap. Une des
façon d’étudier la mise en place de ces nouvelles formations serait de les tester, de faire, de suivre le
processus de sélection en postulant par exemple pour devenir pair-aidant 4 , ou alors de passer le
diplôme d’animateur de GEM délivré par l’Université Paris VIII (http://www.fp.univ-
paris8.org/Animation-de-groupes-d-entraide 200 heures de cours). Je vais aussi préparer un dossier
de VAE pour obtenir un Master2 de psychologie dans le courant 2019 . Dernière initiative en la
matière, suivre des MOOC d’autoformation dans ces domaines (sur les thérapies comportementales
et cognitive ou ).



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